Nellyann Hollis-Pendleton

« vingt et un ans, glasgow, écosse, 17 mars, situation au choix, citadins »

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En fait, Nellyann - le prénom est complètement négociable - est la petite soeur de Cadence. Depuis qu'elle est née, elle subit une pression à savoir qu'elle se doit d'être parfaite en toute circonstance afin de concrétiser le rêve de ses parents d'avoir une dame comme progéniture, et fréquentant de mauvaises personnes, c'est sur un nuage rose fait de coke qu'elle a trouvé le moyen de s'évader. Sentant l'étau se resserrer sur elle - des bribes de conversations entre ses parents, ses notes qui baissent, les mensonges de plus en plus fréquents - dans un moment de panique, elle a planqué sa came dans les tiroirs de Cade, sachant pertinemment qu'elle y cachait son shit et les rares comprimés d'ecsta qu'elle recevait dans les fêtes. Mal lui en pris, car si elle croyait que sa grande soeur la balancerait, en fait, ce n'est pas ce qui est arrivé, Cade s'est tiré. Elle s'est tirée, la pression est devenue pire et la tension à la maison est insoutenable. Elle a merdé, mais merdé comme on devrait pas le faire. Y'a qu'une personne qui peut l'aider, si cette personne - Cade, en l'occurence - ne lui balance pas un piano par la fenêtre si elle toque chez leur tante. Des retrouvailles explosives sont à prévoir, et surtout, jusqu'où ira la fierté des Hollis-Pendleton, qui pliera la première? Car les liens de sang, même si on le désire de toutes nos forces, ça ne se résigne pas, ça reste pour toujours, sans condition...

CADE HOLLIS-PENDLETON ●
« Qu'est-ce que tu fous dans ma chambre? »que je lance à ma mère qui se trouve assise sur mon lit, les jambes croisées, ses dernières injections de Botox lui empêchant d'avoir l'air aussi agacée qu'elle le voudrait, j'en suis à peu près sûr. Lentement, elle lève le bras, puis je devine aisément en voyant apparaître le petit sachet de poudre blanche « Tu crois que je prise ça? ». Elle pince les lèvres, regarde avec dégoût le sachet qui, innocemment, se trouvait dans le tiroir de mes petites-culottes. Comment elle a pu savoir qu'ils étaient là, à moins que... à moins que... non. Non, ça peut pas être ça, ma soeur peut pas m'avoir fait ce coup vache « C'EST MÊME PAS À MOI ». Comment leur dire que même si c'est moi qui sort jusqu'à quatre heures du matin chaque soir, que j'ai des notes au-dessus de la moyenne, mais tout juste, que je suis du genre volage et que je profite des charmes que m'a offert Dame Nature pour soudoyer les mecs qui me tentent, impulsivement, sans réfléchir, c'est pas moi qui consomme la neige qu'elle tient en tremblant. Évidemment, pas une seule minute, pas une seule seconde, ils imaginent que ça pourrait être à Nelly-Ann. Évidemment, leur bébé, leur parfaite petite fille qui entrera à Oxford l'an prochain « Assume tes responsabilités, Cadence ». Je me retourne pour voir mon père, derrière moi, qui m'attrape par le bras et me fout dans le fauteuil près du bureau « Tu ne peux pas rester ici, il n'est pas question que Nelly subisse... ». Je ne peux pas écouter. Je ne peux même plus entendre ses conneries, je hurle en me couvrant les oreilles. Le bruit alerte une certaine demoiselle qui reste figée dans le cadre de porte alors que j'ramasse des trucs à gauche, puis à droite, les fourre dans mon sac à main XXL - encore heureux - en leur crachant leur quatre vérité « Vous savez, des parents aussi cons, on croit que c'est que dans les foutus films américains. Mais non, si toi, t'arrêtait tes délires de grande dame et qu'tu te rendais compte que t'es la plus mauvaise mère que la Terre eut portée, tu serais peut-être capable de faire quelque chose, à condition qu'ton visage ravagé par des bouchers te le permette encore.. ». J'attrape mon portable, des sous-vêtements, passe comme une tempête dans la chambre, puis pointe mon père du doigt « Tu m'as toujours dit de ne dire que la vérité, hein? Sauf que la vérité, mon cher papa, t'es pas foutu de l'entendre ou de l'admettre. Fous ta tête dans le sable comme les autruches, trouillard de merde, et sors de ta tête qu'on est une famille. On est pas une famille, on est les pièces d'une caricature cauchemardesque des liens de parenté ». Mon t-shirt préféré, celui qu'Aubree m'a donné pour anniversaire et que le chanteur d'un groupe londonnien connu m'a arraché dans sa loge VIP. Un souvenir géant, bien meilleur que chacun de ceux qui me rattachent aux membres de la famille Hollis-Pendleton. Je pars pour sortir « Si tu sors de cette pièce, Cadence Allegra Hollis-Pendleton, tu ne remets plus jamais les pieds dans cette maison ». J'éclate de rire, ironique comme pas possible. Je lui adresse un sourire, lève mon majeur, en lui soufflant doucement « Tu crois que j'ai le moindrement envie d'faire semblant qu'on a un truc en commun, qu'on s'aime et qu'on est heureux? Vaut mieux crever complètement déchirée dans une ruelle que de revenir avant que tu réalises que tu as complètement échoué dans ton rôle de père et de protecteur. Tu ne vaux pas mieux que les chirurgiens qui ont défigurés ma mère, toi, t'a gâché ma vie. C'est pire ». Je donne un coup d'épaule à ma soeur, muette, tremblante, vraisemblablement en manque. Mes yeux la fusillent, et si j'aurais été un AK-47, Nelly-Ann ressemblerait à du gruyère « Et toi, fous le camp. De ma vie, de ma vue, et prend même plus la peine de te rappeler que t'a une soeur, t'en a plus, c'est fini, terminé. Tes conneries, maintenant, assume-les, t'aura plus la machiavélique Cade pour te couvrir, junkie ». Je lui ai murmuré ça, parce que j'leur donnerai pas la satisfaction de connaître la coupable. Ma soeur est venue bourrer mes tiroirs de sa drogue pour éviter de se faire pincer. Ça fait des semaines que c'est tendu ici, et j'devais exploser si j'voulais pas sauter d'un pont ou m'flinguer. Quand j'suis dans la rue, je pousse un cri de libération, puis les larmes refoulées remontent à la surface, débordent de mes yeux, brûlent mes joues, tandis que je me laisse glisser contre la façade. Je reste là un moment avant d'appeler Aubree « Viens me chercher. Je fous le camp d'ici pour de bon ».